Croissance à 1,8 % : miracle arithmétique congolais

Cap sur un frémissement de croissance

Dans un contexte régional encore marqué par les effets de chocs exogènes, la République du Congo affiche pour 2025 une progression de son produit intérieur brut réel estimée à 1,8 %. Cette projection, communiquée à Brazzaville par le ministre des Finances, du Budget et du Portefeuille public, Christian Yoka, lors de la deuxième session ordinaire du Comité national économique et financier, confirme la trajectoire haussière amorcée l’an dernier avec un taux de 1,5 %. La Banque des États de l’Afrique centrale, qui consolide les données, relève un « raffermissement mesuré mais significatif » de la conjoncture congolaise.

Hydrocarbures : matrice indéfectible de l’activité

Le secteur pétrolier demeure l’épine dorsale de la croissance. La poursuite des investissements dans les champs matures du littoral et l’entrée en production de poches marginales ont permis de contenir le déclin naturel des puits. Les opérateurs internationaux, encouragés par la stabilité contractuelle, ont injecté de nouveaux capitaux, consolidant ainsi la valeur ajoutée brute du secteur. Toutefois, cette dépendance structurelle aux hydrocarbures, bien qu’elle constitue un amortisseur financier, pose la question récurrente de la vulnérabilité aux fluctuations des cours mondiaux.

Diversification hors pétrole : signaux encourageants

Au-delà des plateaux offshore, les activités hors pétrole apportent des lueurs de diversification. Les filières bois et agroalimentaire, soutenues par la politique d’import-substitution en cours de finalisation, voient leur contribution progresser. L’industrie du sucre et de la brasserie, dopée par la demande intérieure, alimente aussi la valeur ajoutée manufacturière. La relative résilience du secteur des télécommunications, portée par une consommation numérique en expansion, complète ce tableau. Les autorités estiment que ces moteurs parallèles représentent près de 40 % du rebond observé, un ratio appelé à croître à mesure que les réformes structurelles se consolideront.

Inflation : une vigilance communautaire de rigueur

Corollaire logique de la reprise, la courbe des prix se tend. Le taux d’inflation moyen pourrait atteindre 3,5 % en 2025, franchissant la norme communautaire de 3 % admise au sein de la CEMAC. L’impact de la répercussion des cours internationaux sur les produits importés, conjugué aux perturbations intermittentes dans la distribution d’énergie électrique, crée un faisceau de pressions haussières. Les services compétents misent sur le maintien d’un cadre macro-budgétaire prudent pour contenir toute dérive. La récente revalorisation ciblée des tarifs de l’électricité, qui vise à soutenir l’équilibre de la société nationale tout en limitant l’effet prix pour les ménages vulnérables, illustre cette approche graduée.

Crédit intérieur : la détente des créances en souffrance

Le système bancaire se positionne comme catalyseur complémentaire de la croissance. Entre mars 2024 et mars 2025, l’encours de crédits bruts à la clientèle a progressé de 3,3 % pour atteindre 1 647 milliards de francs CFA. Parallèlement, les créances en souffrance se sont contractées de 1,3 %, signe d’un assainissement progressif des bilans bancaires grâce au renforcement des mécanismes de recouvrement. Les autorités monétaires saluent cette évolution, qui réduit le ratio de non-performing loans et libère des marges pour le financement des petites et moyennes entreprises, pivot de l’emploi urbain.

Marché des titres publics : rationalisation bienvenue

Sur le compartiment des valeurs du Trésor, l’État a ajusté à la baisse ses besoins bruts de financement de 22,37 % par rapport à la même période de l’an dernier, conséquence d’une gestion budgétaire plus disciplinée. L’encours global ressort à 2 528 milliards de francs CFA fin avril 2025, soit une hausse modérée de 6,9 % en glissement annuel. La mise sur pied d’un cadre de concertation entre le Trésor public et les Spécialistes en valeurs du Trésor, saluée par le CNEF, a fluidifié les adjudications, amélioré la prévisibilité des émissions et renforcé la confiance des investisseurs institutionnels.

Mobilisation des recettes et contrôle des importations

La consolidation budgétaire passe aussi par une meilleure mobilisation des recettes. L’enquête sur les importations de textile met en lumière des pertes fiscales liées aux déclarations sous-évaluées et aux réexportations non déclarées. Le gouvernement entend appliquer les recommandations issues des travaux pour élargir l’assiette, tout en préservant la stabilité externe de la monnaie. Par ailleurs, la stratégie nationale d’import-substitution, sur laquelle le comité appelle à une concertation élargie, vise à stimuler la production locale et à réduire la dépendance aux biens importés.

Perspectives : cap sur la soutenabilité

Les perspectives 2025 demeurent globalement favorables, à condition de maintenir le binôme discipline budgétaire et vitalité du secteur privé. La dynamique actuelle du PIB, bien que modeste à l’échelle continentale, atteste d’une capacité de rebond après plusieurs années de contraintes externes. Les partenaires techniques évoquent la nécessité d’accélérer les réformes sur la gouvernance des entreprises publiques et la digitalisation de l’administration fiscale, deux chantiers cruciaux pour améliorer l’efficience économique.

Dans cette configuration, l’objectif implicite reste la convergence graduelle vers une croissance inclusive, susceptible de créer des emplois pérennes et de réduire la pauvreté. Le consensus dégagé au sein du CNEF traduit la volonté de préserver l’équilibre macroéconomique tout en capitalisant sur les espaces de diversification. La consolidation de ces acquis devrait permettre au Congo d’aborder la deuxième moitié de la décennie avec une assise plus résiliente face aux cycles pétroliers.