Brazzaville célèbre sa jeunesse studieuse
Sous les boiseries feutrées du Palais des congrès, l’interprétation conjointe des hymnes congolais et chinois a donné à la cérémonie d’émulation 2024-2025 une tonalité résolument bilatérale. Devant un auditoire composé de diplomates, de membres du gouvernement et de parents d’élèves, le directeur général de l’École internationale chinoise, Gildas Niakissa, a rappelé la vocation d’excellence de son établissement fondé sous l’impulsion de l’entrepreneur Cheng Feng. L’année écoulée, marquée par des projets scientifiques, artistiques et solidaires, a permis de souder une communauté scolaire devenue, selon ses mots, « un laboratoire de citoyenneté mondiale ».
L’assiduité a été récompensée par l’annonce très attendue de la meilleure moyenne de l’école, 17,66 sur 20, obtenue par la jeune Henriënna Bindou. Vingt et un écoliers du cycle préscolaire rejoindront en outre le primaire, témoignant de la croissance continue d’un établissement qui mise dès la maternelle sur le trilinguisme français-chinois-anglais.
Une générosité qui s’enracine dans la coopération minière
Point d’orgue de la cérémonie, la remise des bourses Soremi a été assurée par Zhang He, vice-président de la société minière sino-congolaise. L’entreprise, première exploitation intégrée de cuivre et de zinc du pays, participe depuis plusieurs années à la mise en œuvre du Plan national de développement 2022-2026, notamment dans son volet capital humain. En dotant quatre lauréates – Elysée Lucia Bizenga, Janis Jeana Ngoyi-Ngubuku, Medina Prim-Rhoz Monka Kikouka et Fleur Céleste Louingui Malonda – la firme entend, selon Zhang He, « élargir l’horizon de la jeunesse congolaise et consolider l’amitié des peuples ».
Au-delà du geste symbolique, la bourse ouvre l’accès à un accompagnement linguistique et culturel renforcé ; elle s’inscrit dans un continuum allant du primaire à l’Université Marien-Ngouabi, avec laquelle Soremi vient de signer un accord de stages dans la métallurgie. Le croisement des filières éducation et industrie matérialise ainsi la stratégie de diversification voulue par le président Denis Sassou Nguesso, favorable à un transfert de compétences qui ancre durablement l’expertise minière sur le territoire national.
L’internationalisation précoce des savoirs
L’EIC, née du rapprochement croissant entre Brazzaville et Pékin, propose dès le CE1 l’enseignement simultané de l’informatique et de l’anglais, tandis que la langue chinoise est introduite à la maternelle. À la rentrée prochaine, l’établissement étoffera encore son curriculum par la technologie appliquée, le droit, l’économie, l’entrepreneuriat et une initiation au pilotage de drones. Le corps professoral, majoritairement congolais, est appuyé par des enseignants volontaires chinois, ouvrant aux élèves la possibilité de passer les certificats HSK 2 et 3 ; six d’entre eux participeront à un camp linguistique d’automne en Chine, véritable immersion dans le pays dont ils étudient l’idiome.
Les familles, invitées à la tribune, ont souligné l’importance de cette ouverture dès l’adolescence. « Nos enfants acquièrent ici une pluralité de codes culturels qui renforcera leur employabilité dans les industries de demain », a glissé un parent d’élève, saluant un partenariat public-privé aligné sur les ambitions nationales de modernisation.
Enjeux sociopolitiques d’une diplomatie éducative
La cérémonie d’émulation, ponctuée de chorégraphies wushu et de danses traditionnelles kongo, illustre un soft power réciproque. Côté congolais, elle valorise la volonté gouvernementale de promouvoir un enseignement d’excellence capable de retenir les talents sur le sol national tout en attirant des investisseurs. Côté chinois, elle accompagne l’expansion économique par un dialogue interculturel perçu comme mutuellement bénéfique. Les observateurs soulignent que cette approche s’inscrit dans la continuité d’accords de coopération signés lors des récentes visites officielles et qu’elle répond au besoin de profils techniquement qualifiés dans la sous-région.
Pour les chercheurs en sciences sociales, la bourse Soremi constitue un indicateur d’intégration entre capital économique et capital culturel ; elle révèle un déplacement de la philanthropie d’entreprise vers une diplomatie de la connaissance, où l’élève devient le pivot d’un récit commun sur la modernité africaine.
Perspectives et attentes pour la prochaine rentrée
À l’heure où les rubans tricolores retombent, la direction de l’EIC prépare déjà l’année 2025-2026. L’enjeu est double : maintenir des taux de réussite élevés tout en accompagnant l’évolution technologique des programmes. Les investissements consentis par les partenaires privés, à commencer par Soremi, devraient permettre la création de laboratoires dédiés à la robotique légère et à la simulation de vols de drones, alignés sur les objectifs nationaux de transformation numérique.
Dans un contexte régional en quête de main-d’œuvre qualifiée, l’articulation vertueuse entre mine, école et université offre une piste de résilience économique. À Brazzaville, l’élève diligent voit son mérite rétribué et, par ricochet, le tissu industriel local en sort renforcé. Autant d’arguments qui, aux yeux des bailleurs internationaux, confortent la trajectoire de stabilité et de progrès portée par les autorités congolaises.