C2d Congo-France : 229 millions d’euros, et après ?

Un mécanisme innovant de désendettement

Conçu au tournant des années 2000, le Contrat de désendettement et de développement transforme la créance publique française en subvention destinée à financer des programmes structurants dans les pays partenaires. Pour la République du Congo, cet instrument s’est matérialisé en deux conventions, signées respectivement en 2010 et en 2014, soit 80 puis 149 millions d’euros. L’architecture du dispositif illustre une diplomatie financière où la solidarité se conjugue avec l’exigence de résultats mesurables, sans peser sur le service de la dette souveraine.

Une enveloppe de 150,2 milliards de francs Cfa mobilisée

Les 229 millions d’euros convertis équivalent à 150,2 milliards de francs Cfa, ventilés selon trois axes identifiés conjointement par les deux gouvernements : amélioration des infrastructures, renforcement du capital humain et promotion d’une agriculture durable respectueuse de l’environnement. Au terme de la huitième réunion du Comité d’orientation et de suivi tenue à Brazzaville le 10 juillet 2025, le ministre des Finances, Christian Yoka, a confirmé que la totalité des crédits est désormais engagée, reflet d’une appropriation institutionnelle croissante.

Face à la délégation française conduite par l’ambassadeure Claire Bodonyi, le responsable congolais a souligné « la contribution décisive de nos partenaires à la modernisation économique et sociale du pays », rappelant que l’allocation budgétaire a bénéficié d’un suivi rigoureux associant ministères sectoriels, Agence française de développement et société civile.

Des réalisations tangibles malgré des lenteurs

Cinq projets, dont la nouvelle corniche de Brazzaville et la rénovation de réseaux d’eau du Centre hospitalier universitaire, sont déjà opérationnels. Sept autres, à l’instar du Projet paysage forestier Nord-Congo ou du programme d’appui à la relance agricole, avancent à un rythme jugé satisfaisant. Pour les observateurs, ces chantiers constituent des vitrines visibles de la coopération et nourrissent, chez les riverains, une perception positive de l’action publique.

Néanmoins, la temporalité administrative a parfois suscité des frustrations. Les procédures d’appel d’offres et les contrôles techniques, garants de transparence, ont rallongé la phase préparatoire. Les représentants de la société civile, invités permanents du Cos, ont préconisé une plus grande fluidité dans la chaîne décisionnelle afin de réduire l’écart entre planification et exécution.

Inflation et imprévus budgétaires à l’épreuve des chantiers

L’inflation mondiale des matériaux de construction, aggravée par les tensions logistiques post-pandémiques, a renchéri les coûts des ouvrages routiers et hydrauliques. « Les enveloppes initiales ne couvriront probablement pas l’intégralité des activités prévues », a reconnu Claire Bodonyi, arguant d’un dialogue déjà entamé avec d’autres bailleurs pour mobiliser des financements complémentaires. La recherche de cofinancements régionaux ou multilatéraux apparaît désormais comme une piste stratégique pour sécuriser la livraison intégrale des projets à fort impact social.

Le rôle central du Cos dans la gouvernance des projets

Instance paritaire, le Comité d’orientation et de suivi veille à la conformité technique, financière et environnementale des opérations. Lors de sa dernière session, il a entériné la réaffectation des reliquats du Fonds d’études de renforcement des capacités et validé un dispositif de communication destiné à mieux valoriser les retombées du C2d. Surtout, il a recommandé la mise à disposition anticipée des budgets d’entretien des infrastructures, reconnaissant que la durabilité dépend autant de la construction que de la maintenance.

Cette gouvernance inclusive, associant État, partenaires techniques et organisations de la société civile, consolide la légitimité du programme et renforce la culture de reddition de comptes, pierre angulaire des politiques publiques modernes.

Vers une nouvelle dynamique de partenariat

À l’horizon 2029, les projets Mossala, Telema et le plan d’assainissement de Pointe-Noire devraient boucler la chronologie du second C2d. Déjà, les parties prenantes évoquent la possibilité d’une troisième génération de contrats, articulée autour de la transition énergétique, de la digitalisation des services publics et de l’industrialisation agro-alimentaire.

Pour Brazzaville, l’enjeu dépasse le seul achèvement des chantiers. Il s’agit d’inscrire la coopération financière dans un cadre élargi d’investissements productifs, catalyseurs de croissance inclusive. Comme l’a résumé Christian Yoka, « la confiance qui s’est cristallisée dans le C2d ouvre la voie à des partenariats encore plus ambitieux, capables d’accompagner la vision du président Denis Sassou Nguesso pour un Congo émergent et résilient ».

En dépit des aléas inhérents à tout projet de développement, le bilan provisoire atteste qu’un modèle de cogestion respectueux de la souveraineté nationale et des attentes citoyennes est possible. À l’heure où la soutenabilité de la dette africaine occupe le devant de la scène internationale, l’expérience congolaise du C2d offre une matrice féconde pour repenser la coopération franco-africaine dans une perspective d’équité et d’efficacité.