Publié par 20h55 Actualités

Hello Ado: Brazzaville révolutionne l’e-santé jeune

Former les voix numériques responsables

Durant quatre jours, du 19 au 22 août 2025, une salle lumineuse du centre-ville de Brazzaville a réuni journalistes, influenceurs, médecins et activistes. L’atelier, porté par l’UNESCO et le FNUAP dans le cadre du programme “03”, avait un objectif précis : professionnaliser la parole numérique.

Cette initiative, placée sous l’autorité d’Urbain Embemoko, représentant du directeur général de la Santé et de la Population, s’inscrit dans l’élan national visant à renforcer la gouvernance sanitaire et la protection des jeunes. Quarante participants ont ainsi exploré pratiques éthiques, storytelling inclusif et vérifications factuelles.

Pour Fatimata Barry Marega, cheffe du bureau UNESCO, « créer du contenu responsable revient à offrir aux adolescents des repères fiables ». Sa collègue du FNUAP, Agnès Kayitaukore, a ajouté que le numérique « peut devenir une boussole, à condition d’être piloté avec rigueur et empathie ».

Santé reproductive : informer sans brusquer

Selon les données présentées, plus d’un tiers des jeunes interrogés déclarent obtenir leurs informations de santé sexuelle via les réseaux sociaux, souvent sans filtre. Un tel constat impose aux communicants de maîtriser terminologies, références médicales et dimensions culturelles afin d’éviter les approximations pouvant engendrer anxiétés.

L’application Hello Ado, dévoilée durant l’atelier, illustre cette révolution pédagogique. Téléchargeable sur Facebook, Instagram ou TikTok, elle propose questions-réponses anonymes, orientation vers services de proximité et suggestions de lectures adaptées. Les participants ont disséqué son algorithme pour garantir confidentialité, accessibilité et conformité aux normes nationales.

Les experts en sociologie ont rappelé que l’éducation sexuelle numérique repose sur la négociation permanente entre savoir scientifique et normes sociales. Ils insistent : contextualiser les messages, éviter le jugement moral et reconnaître la diversité des trajectoires adolescentes renforcent l’adhésion des publics et préviennent la stigmatisation.

À l’issue des exercices, chaque équipe a prototypé une capsule vidéo de trente secondes intégrant langage neutre, références légales congolaises et indications vers le numéro vert de planification familiale. Les retours du jury signalent une amélioration notable de la clarté visuelle et de l’inclusivité linguistique.

VBG : mobiliser les créateurs de contenu

La lutte contre les violences basées sur le genre a occupé une place centrale. Les formateurs ont mis l’accent sur l’usage des hashtags pour décloisonner les témoignages, tout en soulignant la nécessité de préserver l’anonymat des survivantes. Le cadre juridique national a été décrypté pour prévenir les dérives.

Une simulation de gestion de crise numérique autour d’un cas fictif d’agression a illustré l’importance d’une réponse coordonnée. Les participants devaient publier communiqués, orienter la victime vers structures d’accueil et engager un débat public constructif. L’évaluation a souligné la pertinence d’un ton factuel pour éviter la polarisation.

« En ligne, le moindre mot peut réactiver un traumatisme », a averti la psychologue Carine Ngobo, invitée par le ministère de la Promotion de la femme. Elle recommande d’associer systématiquement services de soutien et modération proactive afin que les plateformes deviennent des espaces de réparation plutôt que d’exposition supplémentaire.

Un regard d’experts sur l’innovation sociale

Le sociologue Ben Makongo a présenté une étude inédite montrant que les contenus coproduits avec les jeunes recueillent 60 % de partages supplémentaires. D’après lui, la cocréation responsabilise l’audience et réduit la méfiance envers les institutions. Ce constat a nourri les discussions sur la pérennisation des initiatives numériques.

Pour approfondir l’impact, les agences onusiennes envisagent un système de suivi par indicateurs de portée, qualité narrative et changement d’attitude. « Nous voulons des chiffres, mais aussi des histoires », a précisé Fatimata Barry Marega, soulignant l’importance de croiser résultats quantitatifs et récits qualitatifs issus du terrain.

Les représentants des ministères sectoriels présents à la restitution finale ont salué un modèle de partenariat public-privé-communautaire. Selon Urbain Embemoko, ce schéma favorise la mutualisation des compétences et l’optimisation des ressources, tout en respectant les orientations du Plan national de développement sanitaire à l’horizon 2030.

Perspectives pour un écosystème durable

Au terme de l’atelier, un engagement collectif a été signé : chaque participant publiera, avant décembre, trois contenus alignés sur la charte éthique élaborée durant les séances. Un groupe WhatsApp assure désormais la relecture croisée et le partage d’alertes en cas de désinformation circulant localement.

L’UNESCO et le FNUAP accompagneront également deux hackathons, prévus à Pointe-Noire et Owando, pour détecter d’autres solutions centrées sur la santé reproductive et la prévention des violences. Les innovations lauréates bénéficieront d’un mentorat technique et d’un relais institutionnel afin d’accélérer leur déploiement national.

En consolidant un réseau d’acteurs formés, le Congo entend transformer les écrans en espaces de protection plutôt qu’en terrains de risques. Ce chantier, soutenu par les partenaires onusiens, illustre la capacité du pays à articuler jeunesse, technologie et santé publique au service d’un développement inclusif.

Les organisations de la société civile présentes, telles que Parole aux Filles et Collectif 50-50, ont souligné que la pérennité dépendra aussi du soutien des opérateurs télécoms. Ces derniers sont invités à faciliter l’accès hors forfait aux contenus de santé publique, afin de réduire la fracture numérique.

Ensemble, ils souhaitent faire du numérique un vecteur sûr d’égalité pour toutes et tous.

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Étiquettes : , , , , Last modified: 1 septembre 2025
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