Hydrocarbures: l’ambitieuse partition d’Itoua

Un séminaire ministériel sous le signe de la redevabilité

Au cœur de l’été brazzavillois, la salle de conférence du ministère des Hydrocarbures a fait office de laboratoire stratégique. Le 18 juillet, Bruno Jean Richard Itoua a convoqué son conseil de cabinet pour dresser un bilan à mi-parcours de l’année 2025, exercice de transparence devenu, selon lui, « une nécessité managériale » (Ministère des Hydrocarbures, juillet 2025). Loin du simple rituel administratif, la réunion s’est voulue un moment d’auto-évaluation collective, chaque direction étant invitée à exposer réussites, retards et correctifs envisagés.

Scruter le premier semestre 2025

La performance du secteur pétrolier congolais détermine la trajectoire macro-budgétaire du pays. Sur les six premiers mois, les équipes d’Itoua ont enregistré des avancées sur le conventionnement des blocs off-shore, tandis que la production est restée sous la barre des prévisions. Cette sous-performance temporaire, attribuée à des arrêts techniques et à la lenteur de certains partenaires, a persuadé le ministre de durcir le suivi des contrats et de renforcer la culture de résultat au sein de l’administration.

Quinze prescriptions aux allures de feuille de route

Dans un document de travail succinct, mais à forte portée symbolique, quinze axes prioritaires ont été livrés aux directeurs généraux. Le maître-mot en est la gouvernance : révision des textes encadrant la transparence, montée en puissance du numérique pour la traçabilité des flux financiers et alignement des indicateurs de performance sur les standards internationaux. L’objectif assumé est d’arrimer la première ressource nationale aux exigences de compétitivité globale, tout en préservant les intérêts stratégiques de la République du Congo.

Redynamiser l’amont pour relancer l’exploration

Sur le segment amont, la stratégie dévoilée mise sur la relance exploratoire et l’optimisation des champs matures. Itoua fixe la barre à 5000 barils équivalent pétrole par jour supplémentaires d’ici 2031, une ambition réaliste eu égard aux données sismiques récemment retraitées. Pour y parvenir, des incitations fiscales révisées, couplées à des clauses de contenu local, seront négociées avec les majors et les indépendants. Dans l’esprit du ministre, attirer les capitaux revient à offrir une équation risque-rendement équilibrée, mais également lisible pour les bailleurs qui scrutent la stabilité réglementaire congolaise.

Approvisionnement : la stratégie du « coup de poing » carburant

L’aval, confronté depuis plus d’un an à une pénurie chronique, reste la préoccupation immédiate des usagers domestiques. Le ministère a donc opté pour une importation massive, baptisée opération « coup de poing », destinée à assurer trois mois d’autonomie nationale. Concrètement, des cargaisons seront acheminées depuis les hubs de la côte atlantique, tandis qu’à Brazzaville, trois stocks de sécurité, totalisant deux mois supplémentaires de couverture, seront constitués. Selon les projections internes, cette manœuvre permettra de lisser la volatilité des prix et de restaurer la confiance des acteurs économiques tributaire d’un accès continu au carburant.

Vers une architecture énergétique pérenne

La solution conjoncturelle ne saurait occulter les chantiers de long terme. Le gouvernement confirme le redémarrage prochain de la deuxième raffinerie, retardé par les aléas logistiques liés à la pandémie. Parallèlement, le tracé de l’oléoduc Pointe-Noire-Brazzaville, destiné à sécuriser l’approvisionnement de la capitale et des corridors exportateurs, vient d’être finalisé. L’infrastructure, une fois opérationnelle, devrait réduire les coûts de transport de près de 25 %, renforçant ainsi la compétitivité du produit raffiné localement.

Perspectives et vigilance internationale

À l’échelle sous-régionale, la diplomatie énergétique congolaise s’inscrit dans la recherche d’une intégration accrue des réseaux de pipelines et d’électricité. Les quinze axes définis par le ministre sont donc lus, par les observateurs, comme une contribution à la stabilité économique de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale. Reste la vigilance sur l’exécution : gouvernance des revenus, respect des normes environnementales et montée en compétence de la main-d’œuvre nationale constitueront les baromètres d’une stratégie qui, si elle est menée avec rigueur, pourrait repositionner le Congo comme hub énergétique africain.