Une échéance électorale stratégique
Le Congo se dirige vers une présidentielle prévue les 17 et 22 mars 2026. Dans le sillage d’un calendrier constitutionnel respecté, la qualité de l’information devient un indicateur majeur de stabilité. Les rédactions s’activent pour éviter toute désinformation susceptible d’alimenter les tensions sociales.
Consciente de ces défis, la représentation de l’Unesco à Brazzaville a mobilisé ses partenaires étatiques afin de consolider la formation continue des journalistes. L’organisation onusienne rappelle régulièrement que la paix commence par la confiance dans la parole publique, et cette confiance repose sur la compétence.
Le ministère de la communication, la Commission nationale électorale indépendante et le Conseil supérieur de la liberté de communication se sont joints à l’initiative. Pour le porte-parole du gouvernement, Thierry Moungala, la démarche offre l’occasion « d’amplifier les voix féminines qui humanisent l’information ».
Le choix de réunir cinquante femmes correspond à un double objectif. Il s’agit d’augmenter la proportion de femmes dans la couverture politique et de valoriser leur regard, souvent jugé plus attentif aux acteurs de terrain, aux communautés rurales et aux arbitrages sociaux invisibles.
Le dispositif pédagogique en détail
Durant trois jours, les participantes se sont installées dans les salles de conférence du Pefaco Hôtel. Sous la coordination du journaliste Arsène Sévérin Ngouéla, le programme alterne exposés théoriques et simulations de terrain afin de gommer l’écart entre normes internationales et réalités locales.
Gaston Ololo, président de la commission technique de la C.N.E.I, a ouvert une séquence sur l’organisation pratique d’un scrutin. L’accent porte sur la cartographie des bureaux de vote, la centralisation des procès-verbaux et les mesures de sécurité destinées aux reporters affectés en zones éloignées.
L’ancien haut conseiller Joachim Mbanza a rappelé que la neutralité n’interdit pas la vigilance. « Le journaliste doit pouvoir décrire une scène électorale sans véhiculer d’a priori ni d’émotion partisane, tout en restant sensible aux signaux d’alerte », souligne-t-il, évoquant l’importance du fact-checking.
Genre et médiation sociale
Dans son discours inaugural, la représentante de l’Unesco, Fatoumata Barry Marega, a insisté sur la spécificité des femmes journalistes face aux flux numériques. Selon elle, leur capacité à contextualiser l’information est un atout dans un environnement saturé de contenus bruts et souvent non vérifiés.
Les chercheuses congolaises en sociologie des médias soulignent que la présence féminine réduit la polarisation des débats. Les entretiens réalisés par l’Institut panafricain de gouvernance montrent qu’une équipe éditoriale paritaire consacre en moyenne 30 % de temps d’antenne supplémentaire aux enjeux de cohésion sociale.
Thierry Moungala reprend cet argument, évoquant la « sensibilité maternelle » comme vecteur d’inclusion. La formule, parfois contestée, renvoie néanmoins à une réalité : les journalistes femmes interviewent davantage de porte-voix communautaires, augmentant la représentativité du discours public.
La session brazzavilloise ambitionne ainsi de transformer la parité en levier de médiation, au moment où le débat politique s’intensifie. Les participantes se sont engagées à constituer un réseau d’entraide pour partager des sources et vérifier les contenus circulant sur les réseaux sociaux.
La sécurité, condition de la liberté
La formation aborde aussi la protection physique et numérique. Prosper Miyindou Ngoma, du Centre d’information des Nations unies, rappelle que les brimades contre la presse touchent souvent d’abord les femmes. Les modules proposent des techniques de cryptage, de couverture en binôme et de gestion du stress post-terrain.
Ces conseils pratiques répondent aux recommandations de la Résolution 2222 du Conseil de sécurité, laquelle invite les États à renforcer la sécurité des professionnels des médias pendant les conflits et les périodes électorales. Le Congo transpose progressivement ces standards dans son cadre réglementaire.
Les participantes ont partagé des expériences de reportage dans le Pool ou dans la Likouala, régions où l’accès au réseau est fragile. Les discussions montrent que la sécurité logistique demeure une préoccupation, mais qu’elle peut être atténuée par des protocoles clairs et un dialogue permanent avec les autorités locales.
Au terme de l’atelier, un guide de bonnes pratiques sera diffusé dans toutes les rédactions de Brazzaville et de Pointe-Noire. Ce manuel compile recommandations de l’Unesco, extraits du code d’éthique et fiches contacts des services d’urgence, afin d’installer des réflexes communs.
Perspectives vers mars 2026
La session d’août 2025 n’est présentée que comme une étape. D’ici à l’ouverture de la campagne officielle, deux autres cycles sont prévus, l’un sur la couverture des résultats provisoires, l’autre sur l’analyse de discours politiques.
Les partenaires institutionnels se disent confiants. Henri Bouka, président de la Cour suprême et de la C.N.E.I, estime que « la rigueur médiatique contribue à sanctuariser le vote ». Il évoque l’idée de salles de presse temporaires dans chaque chef-lieu départemental.
Sur le terrain, les mêmes journalistes devront concilier deadlines serrés, pression des réseaux sociaux et attentes citoyennes. Un engagement collectif émerge : renforcer la vérification des données chiffrées publiées la nuit des résultats, souvent à l’origine de rumeurs.
À moyen terme, le vrai test résidera dans la perception du public. Si les électeurs jugent l’information crédible et équilibrée, la formation aura produit son effet multiplicateur : consolider la paix par le professionnalisme et offrir, grâce aux voix féminines, un miroir plus complet de la société congolaise.











