ODD3 : la cure de jouvence administrative congolaise

Des assises nationales au chevet du secteur

Clôturée le 18 juillet à Brazzaville, la deuxième session du Conseil national de la santé s’est imposée comme un moment charnière pour l’architecture sanitaire congolaise. Réunis autour du thème « La gouvernance du système de santé congolais face aux défis de l’Objectif de développement durable 3 », experts, représentants des professions médicales et décideurs publics ont mis en résonance diagnostics techniques et urgence politique. Au terme de débats qualifiés de « sereins et exigeants » par un participant du ministère, une série de recommandations a obtenu l’unanimité, confirmant une volonté de convergence plutôt rare dans un domaine souvent fragmenté.

Financement : le nerf d’une médecine inclusive

Le premier axe de réforme porte sur la soutenabilité financière du système. Les spécialistes du Budget rappellent que la part consacrée à la santé fluctue encore au-dessous du seuil de 15 % fixé à Abuja, tandis que les paiements directs des ménages peuvent représenter jusqu’à la moitié des dépenses totales. Les travaux recommandent l’élargissement de la Couverture santé universelle, la rationalisation des dépenses courantes et la création d’un fonds de péréquation destiné à amortir les chocs exogènes, qu’ils soient épidémiologiques ou climatiques. Selon un économiste présent, « la prévisibilité des ressources publiques et l’innovation fiscale, notamment via des taxes de solidarité, demeurent les conditions cardinales d’un accès équitable aux soins ».

Infrastructures et districts : la maille territoriale

Un second chantier concerne la densification des plateaux techniques sur l’ensemble du territoire. Les participants ont souligné l’importance de revitaliser les districts sanitaires, colonne vertébrale de la stratégie de soins primaires. Plusieurs hôpitaux de référence bénéficieront d’une mise à niveau ciblée, tandis que les centres de santé intégrés devront être dotés d’équipements d’imagerie légère et de laboratoires de biologie courante. L’objectif est d’éviter la concentration des services dans les seules aires urbaines de Brazzaville et de Pointe-Noire et de réduire les délais de prise en charge en zone rurale. L’ingénieur biomédical Sylvie Bakala y voit « une condition sine qua non pour rétablir la confiance entre usagers et système public ».

Partenariats public-privé : l’amorce pragmatique

Les débats ont par ailleurs acté la nécessité d’un dialogue approfondi avec le secteur privé. Laboratoires pharmaceutiques, cliniques et organisations non gouvernementales seront progressivement associés à la planification afin de mutualiser les investissements et accélérer le transfert de technologies. Le projet de décret modifiant le texte fondateur de 1984 ouvre une fenêtre réglementaire à ces collaborations. Pour le docteur Henri Ossiala, représentant d’une fédération d’établissements libéraux, « l’État garde la boussole stratégique, mais admet que l’efficacité passe par une coproduction de services ».

Climat, cadre juridique et participation communautaire

Le Conseil a également mis l’accent sur l’impact sanitaire des dérèglements climatiques, anticipant la recrudescence des maladies hydriques et vectorielles. Les universitaires recommandent d’intégrer des indicateurs environnementaux dans la surveillance épidémiologique et d’adapter les constructions hospitalières aux aléas extrêmes. Dans le même mouvement, la démocratisation de la gouvernance se précise : comités de santé de village, associations de patients et conseils municipaux seront appelés à co-élaborer les plans locaux. Cette approche inclusive trouve un prolongement dans la promotion de la santé, domaine dans lequel les campagnes de proximité et l’usage raisonné des réseaux sociaux devraient combler les fossés informationnels.

Vers une gouvernance de santé résiliente

En clôturant les travaux, le ministre de la Santé et de la Population, Jean-Rosaire Ibara, a salué « l’audace collective » des propositions et assuré que son département mobiliserait l’ensemble des secteurs concernés pour transformer les ambitions en actions. L’administration centrale se dit prête à aligner les calendriers budgétaires et à renforcer les mécanismes d’évaluation afin de produire des résultats tangibles d’ici au prochain cycle de révision. Dans un contexte africain où la robustesse des systèmes de santé est devenue paramètre stratégique de stabilité, le Congo-Brazzaville affiche ainsi une orientation claire : consolider l’ODD 3 par une gouvernance modernisée, financièrement viable et attentive aux vulnérabilités contemporaines. Les prochaines étapes, qui passeront par l’adoption formelle du décret et le déploiement territorial des mesures, constituent désormais le véritable test de la dynamique engagée.