Rencontre stratégique au Mémorial
À Brazzaville, le mémorial Pierre-Savorgnan-de-Brazza a servi, le 3 septembre, de cadre à une rencontre discrète mais significative entre Yennie Clara Mathurtine Osseté née Mberi Mouketou, nouvelle secrétaire exécutive du Conseil consultatif de la femme, et la directrice générale, Bélinda Ayessa.
Aux abords du fleuve Congo, les deux responsables ont confronté visions et calendriers en moins d’une heure, explorant la place de l’art dans la stratégie nationale de promotion du leadership féminin tout en préservant le caractère mémoriel du site.
Cette visite illustre l’attention croissante accordée par les institutions publiques aux synergies entre culture, patrimoine et autonomisation économique, sans négliger l’impératif d’égalité que le gouvernement place au cœur de l’agenda 2022-2026.
Le Conseil consultatif de la femme en action
Le Conseil consultatif de la femme, créé en 2019, agit comme organe d’interface entre la société civile et les ministères sectoriels afin de recueillir, formaliser et transmettre des recommandations tenant compte des réalités spécifiques vécues par les Congolaises.
En qualité de secrétaire exécutive, Yennie Clara Mathurtine Osseté a rappelé ses priorités : accès élargi à l’éducation des jeunes filles, implication accrue des femmes dans les conseils locaux et valorisation des figures féminines historiques longtemps restées dans l’ombre.
« Nous devons sortir les héroïnes de la confidentialité et en faire des repères pour les adolescentes », a-t-elle déclaré, soulignant que chaque initiative culturelle doit devenir facteur d’émancipation et non simple célébration esthétique.
Patrimoine artistique et autonomisation
La rencontre a permis d’explorer des convergences concrètes entre la programmation du mémorial et les objectifs du Conseil, notamment à travers des ateliers d’éducation artistique destinés aux lycéennes de Brazzaville et de la cuvette.
Bélinda Ayessa a rappelé que le site, inauguré en 2006, dispose d’espaces modulables pouvant accueillir expositions temporaires, lectures publiques ou formations numériques, autant d’outils pour rapprocher le patrimoine d’un public féminin souvent sous-représenté dans les institutions muséales.
En réponse, la secrétaire exécutive a souhaité qu’une exposition itinérante retrace le parcours de pionnières congolaises dans la diplomatie, la médecine ou l’agronomie, afin de déconstruire les stéréotypes et stimuler l’ambition des collégiennes en zone rurale.
La jeunesse féminine au centre des priorités
Les deux responsables se sont également engagées à soutenir Rosamour Pavelickh, jeune entrepreneuse culturelle porteuse d’une conférence programmée en octobre, consacrée à la santé mentale des filles victimes de cyberviolence.
Ce projet, encore en phase de recherche de financements, prévoit la présence de psychologues, juristes et influenceuses capables de sensibiliser, mais aussi de proposer des mécanismes d’alerte précoce dans les établissements secondaires.
Vers une conférence pionnière en octobre
Pour rendre possible l’événement d’octobre, le mémorial mettra à disposition son auditorium de 200 places tandis que le Conseil consultatif de la femme mobilisera un réseau de marraines issues des médias et des services de santé.
Un dossier de financement est actuellement étudié par plusieurs entreprises parapubliques, désireuses d’associer leur image à un projet mettant en avant la responsabilité sociétale et la prévention des discriminations numériques, a indiqué une source proche de l’organisation.
Une stratégie de communication orientée vers les quartiers périphériques doit garantir la participation d’adolescentes rarement touchées par les campagnes classiques, selon Yennie Clara Mathurtine Osseté, qui insiste sur « l’aller-vers » comme principe méthodologique.
L’événement alimentera une base de données anonymisée permettant de mieux cerner les manifestations locales de la violence numérique et d’orienter les futures actions de plaidoyer auprès des fournisseurs d’accès et des plateformes.
Un mémorial, des récits renouvelés
Au-delà de l’agenda immédiat, la visite guidée a rappelé la portée symbolique du mémorial, lieu de mémoire mais aussi laboratoire d’un dialogue interculturel porté par l’histoire de Pierre Savorgnan de Brazza et son engagement en faveur d’échanges pacifiques.
En arpentant les galeries, la secrétaire exécutive a constaté que l’iconographie de l’explorateur peut servir de point d’entrée à une réflexion sur la place des femmes dans la narration coloniale et postcoloniale, encore souvent marginalisée.
Selon Bélinda Ayessa, l’intégration de parcours féminins dans le futur dispositif muséographique constituera « un levier éducatif puissant, capable de relier la grande histoire aux vécus contemporains des élèves ».
La directrice générale prévoit aussi le déploiement d’audioguides multilingues, avec une piste en lingala explicitement conçue pour mettre en lumière les contributions féminines, une première dans le réseau muséal national.
Une collaboration avec l’Université Marien Ngouabi devrait assurer l’actualisation scientifique des contenus.
Vers une dynamique inclusive
La rencontre du 3 septembre s’inscrit ainsi dans une dynamique plus large de renforcement institutionnel où patrimoine, recherche et action sociale se conjuguent pour promouvoir la citoyenneté des femmes, conformément aux orientations définies au niveau national.
Si les défis restent nombreux, la convergence affichée par les deux institutions témoigne d’un espace croissant laissé à l’initiative féminine et à la co-construction de solutions adaptées aux réalités locales.
Les prochains mois diront dans quelle mesure ces engagements trouveront un prolongement durable, mais l’alliance entre le Conseil consultatif de la femme et le mémorial souligne déjà la capacité d’innovation des actrices culturelles congolaises.











