Un dispositif continental adapté au Congo
Réuni le 22 août à Brazzaville, le comité de pilotage de YouthConnekt Congo a présenté des résultats inattendus pour un programme lancé voici à peine un an et demi. Les partenaires ont décidé d’amplifier l’effort, convaincus de son utilité sociale.
Porté par le ministère de la Jeunesse et le PNUD, YouthConnekt s’inscrit dans le projet gouvernemental Projeunes, qui fédère les initiatives publiques et onusiennes en direction des 60 % de Congolais âgés de moins de 25 ans, selon les données officielles.
Un bilan chiffré encourageant
Adama Dian Barry, représentante résidente du PNUD, note que 1 200 jeunes filles ont été initiées aux métiers du numérique, qu’une plateforme U-Report regroupe déjà 36 000 inscrits et que plus de 5 000 adolescents ont reçu une information fiable sur la santé reproductive.
Le projet a également cadré 2 400 diplômés, dont 45 % de femmes, dans un dispositif de stage accéléré élaboré avec le patronat. Cent quinze d’entre eux occupent désormais des postes, preuve qu’un accompagnement court mais structuré peut ouvrir les portes du marché.
L’insertion professionnelle des jeunes femmes
Pour Sylvie Goma, sociologue du travail, « l’accès à une première expérience rémunérée transforme la trajectoire des jeunes Congolaises, souvent confrontées au chômage de longue durée ». Elle estime que la mixité des cohortes crée des modèles féminins visibles, stimulant l’ambition des plus jeunes.
Les partenaires du projet entendent renforcer la dimension genre en proposant, dès octobre, des modules sur la négociation salariale et la gestion de carrière. L’objectif est de préparer les stagiaires à des environnements parfois marqués par des rapports de pouvoir inégaux.
Santé sexuelle et autonomie des adolescentes
L’application Hello ADO, hébergée localement, délivre des conseils anonymes sur la contraception, les infections sexuellement transmissibles et le consentement. Selon le ministère de la Santé, 68 % des utilisatrices se déclarent mieux informées, un indicateur prometteur pour la prévention des grossesses précoces.
Le comité de pilotage discute à présent d’un partenariat avec les centres de santé scolaires, afin d’orienter les adolescentes vers des structures physiques lorsque cela s’avère nécessaire. La mesure pourrait élargir la prise en charge psychologique des victimes de violences sexuelles encore trop silencieuses.
Innovation numérique comme levier d’égalité
Au-delà des applications, YouthConnekt mise sur des hackathons féminins. Le dernier concours, organisé avec l’incubateur Mak’IT, a récompensé trois solutions créées par des étudiantes de l’École polytechnique de Brazzaville, dont un prototype d’alerte géolocalisée contre le harcèlement de rue.
« Quand les jeunes femmes codent des outils répondant à leurs propres préoccupations, l’appropriation communautaire est immédiate », analyse Mireille Ife, experte en développement numérique. Elle recommande d’allouer des micro-subventions pour accélérer le passage du prototype à la commercialisation et éviter la dispersion des talents féminins.
Une collaboration multisectorielle exemplaire
Le patronat, les organisations de jeunesse, les agences onusiennes et les ministères concernés siègent ensemble au comité. Cette gouvernance partagée limite les duplications de projets et favorise la mutualisation des bases de données, soulignent plusieurs observateurs présents lors de la session d’août.
L’approche séduit également les bailleurs. La Banque africaine de développement étudie une ligne dédiée à l’entrepreneuriat féminin, tandis que le Fonds des Nations unies pour la population propose d’intégrer ses modules de prévention des violences au volet formation civique déjà piloté par Projeunes.
Mobiliser des ressources durables
Hugues Ngouelondelé, ministre de la Jeunesse, insiste sur l’alignement du programme avec la Politique nationale de la jeunesse 2025-2034. Cette cohérence, affirme-t-il, doit rassurer les partenaires techniques et garantir un flux financier régulier au-delà de l’appui actuel.
Le comité prévoit donc d’élaborer un plan de financement mixte associant secteur privé, agences multilatérales et diaspora. Selon un document de travail consulté, l’objectif est de mobiliser 10 millions de dollars supplémentaires sur quatre ans pour maintenir l’effort envers les jeunes femmes.
La jeunesse, partenaire du développement national
Au Congo-Brazzaville, six jeunes sur dix vivent en zone urbaine et aspirent à des emplois modernes. Sans leur implication, souligne le politologue Clément Souami, les objectifs de diversification économique inscrits dans le Plan national de développement risqueraient de rester théoriques.
Des jeunes bénéficiaires réunis en marge de la session évoquent déjà des retombées visibles : revenus stables, confiance retrouvée, volonté de mentorat. « Je veux à mon tour former des collégiennes au code », confie Grâce Mbemba, 22 ans, diplômée du premier bootcamp numérique.
Pour les observateurs, l’enjeu est désormais de transformer ces destins individuels en dynamique collective. L’extension des hubs régionaux, l’interconnexion avec les programmes agricoles et la poursuite des campagnes contre les violences sexistes constituent autant de pistes étudiées par les équipes techniques du projet.
En misant sur la formation, la santé sexuelle et l’innovation, YouthConnekt Congo démontre qu’une politique publique peut intégrer l’égalité femmes-hommes sans s’y réduire. La session d’août a fixé un cap clair : consolider les acquis et élargir l’impact sur tout le territoire national.
Le comité se réunira de nouveau en décembre pour évaluer la mise en œuvre des recommandations et publier un tableau de bord public. Cette transparence devrait renforcer la confiance des citoyens, surtout parmi les nouvelles électrices.











